Ça vous dit, une lecture formidable et rétro pour rêver à San Francisco? Le roman « Poupées de Chine » de Lisa See nous emmène à Chinatown en 1930.
De retour de San Francisco, j’ai cherché des romans qui se déroulaient dans la ville américaine que j’aime tant pour prolonger mon road-trip californien… J’ai un faible pour SF, que j’ai retrouvée avec émotion l’été dernier ♡ et que j’avais adorée découvrir à travers Les Chroniques de San Francisco d’Armistead Maupin – qu’on ne présente plus ^^
Je suis ravie d’avoir découvert « Poupées de Chine » de Lisa See pour plusieurs raisons. C’est une plongée dans le Chinatown des années 1930 et 1940, avec un aspect culturel, historique, et social. Il raconte les mésaventures de trois jeunes femmes, artistes dansant dans un cabaret et rêvant de gloire.
A travers leur amitié qui connaît des hauts et des bas, l’auteure évoque des thèmes de société comme le racisme envers la population asiatique aux Etats-Unis (malheureusement toujours d’actualité), les défis que posent la biculturalité, entre envie de liberté et le poids des traditions, ou la Seconde Guerre Mondiale et les camps d’internement japonais sur sol américain.
Ce roman plein de paillettes m’a totalement happée, même si le milieu du music hall n’est pas forcément ma tasse de thé! J’ai aimé ce contraste entre le glamour de la scène et les inquiétudes sombres de l’époque… et les non moins sombres chamailleries dans les coulisses! Les trois héroïnes sont tour à tour attachantes – ou énervantes – mais ne m’ont pas laissée indifférente.
Après vous avoir parlé le mois dernier de ce superbe roman parlant aussi d’identité culturelle, et formant un pont entre continent africain et américaine, je suis ravie de vous conseiller à nouveau un livre qui permet de se pencher sur ces questions.
De quoi parle le roman « Poupées de Chine » en deux mots
La description de l’éditeur J’ai Lu
San Francisco, 1938. Grace, Helen et Ruby, trois jeunes femmes aux trajectoires différentes, se rencontrent par hasard au Forbidden City, un cabaret de nuit chic et sélect. Grace Lee, Américaine d’origine chinoise, a quitté le Midwest pour fuir un père violent. Helen Fong veut échapper au carcan d’une famille traditionaliste où elle étouffe. La sublime Ruby Tom défie quant à elle les conventions de l’époque avec son attitude provocatrice et son ambition sans limites. Devenues « meilleures amies », elles affrontent main dans la main imprévus et revers de fortune. Mais l’attaque de Pearl Harbor trois ans plus tard va bientôt bouleverser leurs vies.
Le roman a été publié en 2016 en français.
Trois héroïnes à Chinatown
Tour à tour les héroïnes du roman « Poupées de Chine » se soutiennent comme des soeurs, solidaires, ou sont capables de se trahir. Elles en font en voir de toutes les couleurs à leur amitié. Elles ont aussi chacune leur caractère.
La protagoniste principale, Grace, est la plus naïve mais aussi la plus gentille. Elle a un réel talent pour la danse, entraînée depuis son enfance. Elle se laisse souvent faire et parfois avoir par les chantages, mais apprendra à se battre pour elle-même. Elle s’est enfuie de chez elle pour couper les ponts avec un père violent.
Helen, jeune femme issue d’un milieu aisé de Chinatown, essaie d’échapper au carcan de sa famille très très traditionnelle. Elle a l’air plus mature et posée que ses comparses, mais ces airs cachent une grande insécurité et une blessure terrible.
Ruby, femme sublime et qui sait en jouer, ne recule devant rien pour trouver la gloire. Ni à se dénuder, ni à piétiner les autres. Elle manque d’empathie mais pas d’ambition! Malgré tout, on admire son audace et sa ténacité. Elle aussi cache un gros secret…
Les thèmes de société du roman « Poupées de Chine »
Le roman évoque des thèmes profonds comme…
Le fait que les jeunes générations nées sur sol américain se sentent biculturelles, et ont parfois de la peine à naviguer cette double-identité. Ils ne veulent pas renier leurs racines, mais sont tiraillés entre le mode de vie traditionnel, et l’attrait de la liberté de la culture à l’américaine.
L’invasion japonaise en Chine et les exactions des militaires japonais dans le pays créent de grosses tensions entre les deux communautés.
Le racisme et les standards de beauté caucasiens de l’époque font que les cabarets lancés par des hommes d’affaire de Chinatown en présentant des artistes asiatiques sont une grande nouveauté.
L’auteure Lisa See a réalisé un sacré travail de documentation historique sur le milieu du music hall, en témoignent à la fin du roman les nombreuses sources, entretiens et artistes de l’époque qu’elles a rencontrés.
Les camps d’internement japonais
Lors de mon voyage à San Francisco, j’ai fait un tour par Chinatown ainsi que Japantown, qui ont une ambiance très différentes. A Japantown, j’ai suivi un circuit historique racontant l’histoire du quartier sur des panneaux. J’ai été très touchée par la façon dont les Japonais expatriés aux USA ont été (mal)traités durant la Seconde Guerre mondiale.
Si je simplifie, suite à Pearl Harbour, on les a obligés à vendre leurs commerces pour une bouchée de pain, à abandonner maisons et possessions pour partir dans des camps d’internements. Là, ils ont vécu dans des conditions humiliantes pendant quelques années. Cela représente 120’000 personnes, dont des Nisei, les « deuxième génération », nés aux USA et au passeport américain, malgré leurs origines japonaises.
Après les années d’internements, ils sont rares à avoir retrouvé leurs commerces ou maisons. Dans le roman « Poupées de Chine », un personnage va être envoyé dans un de ces camps et nous permettre de découvrir ce pan de l’histoire de l’intérieur.
Radio France y avait consacré ce dossier, et National Geographic cet article.
J’espère vous avoir donné envie de lire le roman « Poupées de Chine » de Lisa See, plein de paillettes mais aussi profond avec les thèmes sociaux évoqués! J’ai aimé aussi en découvrir plus sur la culture chinoise, que je ne connais pas du tout étant plutôt sensible à la culture du Japon ♡